Valeur et puissance du Rosaire (1)

Source: District of Canada

En ces temps d’épreuve et d’incertitude, alors que la plupart d’entre nous sont privés des sacrements, il paraît utile de remettre en honneur une prière dont beaucoup parlent mais que bien peu connaissent sous son vrai jour : le très saint Rosaire. Que Notre-Dame daigne bénir ce pauvre travail en enflammant les âmes d’un grand zèle et d’une grande dévotion envers cette prière ! Nos vœux seront alors largement comblés.

Après le Saint-Sacrifice de la Messe et la divine liturgie qui en est inséparable, le Rosaire est certainement la meilleure prière que le Ciel nous ait donnée, prière dont l’efficacité redoutable, prouvée maintes fois par l’Histoire, nous est aujourd’hui encore trop méconnue, tellement notre esprit est encombré d’objections à ce sujet. Examinons d’abord sa valeur.

1. Une excellente prière

Il est évident que le Sacrifice du Calvaire, renouvelé sacramentellement sur nos autels, est la prière la plus sublime qui soit, et que toute la liturgie qui l’enchâsse (sacrements, Bréviaire…) jouit d’une éminente supériorité sur toute autre prière. Cela étant posé, il semble bien que c’est au Rosaire que revient ensuite le premier rang. Dans le beau traité qu’il a écrit à ce sujet[1], saint Louis-Marie Grignion de Montfort expose les raisons de cette dignité : le Rosaire est composé des meilleures prières, et il nous fait contempler les plus touchants mystères. Essayons d’expliquer.

Le Rosaire contient les plus belles prières qui nous aient été enseignées : le Pater, qui nous vient de Notre-Seigneur lui-même, et l’Ave, apporté du Ciel par l’ange Gabriel, qui est ce que la Sainte Trinité a trouvé de meilleur pour toucher le cœur de la Très Sainte Vierge et obtenir son consentement à l’Incarnation. Ainsi, ces paroles touchent toujours notre Mère et l’inclinent à nous accorder ses faveurs.

Mais le Rosaire n’est pas une pure prière vocale. Il est aussi, et surtout, une méditation qui nous élève aux plus hautes cimes de la contemplation, en mettant devant nos yeux les mystères de notre salut, et ce à l’école si maternelle de la meilleure éducatrice qui soit. Comme le dit saint Louis-Marie : « Le Rosaire, sans la méditation des mystères sacrés de notre salut, ne serait presque qu’un corps sans âme. » Il est donc important de s’efforcer de méditer chacun des mystères, et la répétition des Ave nous est un excellent soutien pour cela. On pourrait en effet se demander pourquoi répéter cinquante fois les paroles de l’ange à Notre-Dame, que ce soit pour les mystères joyeux, douloureux ou glorieux. Il est vrai, nous venons de le dire, qu’elles plaisent éminemment à la sainte Vierge. Mais n’y a-t-il pas d’autres prières qui plaisent au Ciel (par exemple les Psaumes), et que nous aurions pu réciter dans le chapelet ? Saint Louis-Marie nous répond en expliquant que le mystère de l’Incarnation (et donc de l’Annonciation) « contient la volonté et la grâce de tous les mystères[2] ». En effet, c’est pour pouvoir vivre tous les autres mystères que Notre-Seigneur s’est incarné, et sans ce mystère, il n’en aurait vécu aucun autre. Mais il y a plus. En prononçant son acceptation d’être la Mère du Sauveur – « Ecce ancilla Domini, fiat mihi secundum verbum tuum … Voici la servante du Seigneur, qu’il me soit fait selon votre parole » – Marie s’unit aux premières paroles du Verbe éternel s’incarnant en elle : « Ecce venio… Me voici, ô Dieu, pour faire votre volonté[3] ». Cet Ecce, ce Fiat, Marie va les prolonger, en union avec son divin Fils, en chacun des mystères de notre salut, même – et surtout – au pied de la Croix. Ainsi, en récitant notre chapelet, nous nous plongeons dans cette ambiance de l’Annonciation, pour y puiser le même esprit, les mêmes dispositions de généreuse acceptation qui ont animé les Cœurs unis de Jésus et de Marie ici-bas. À l’invitation de saint Paul, nous devons avoir en nous « les dispositions du Christ Jésus… qui s’est fait obéissant jusqu’à la mort, et à la mort de la Croix[4] ». Le chapelet est un excellent moyen pour nous imprégner de ces dispositions, à l’école de la très sainte Vierge Marie.

Ces motifs nous lèvent un peu le voile sur la valeur de ces couronnes mystiques que nous tressons à notre Mère du Ciel, comme autant de roses qui viennent orner son diadème éternel et appellent sur nos âmes des grâces de choix. Cependant, en raison de notre faiblesse et de nos vues bassement matérielles, Notre-Dame a voulu confirmer par des faits historiques indubitables la valeur tout à fait étonnante de cette prière si simple. (à suivre)

Rosarius


[1]Le Secret admirable du Très Saint Rosaire, de saint Louis-Marie Grignion de Montfort (Seuil)

[2]Traité de la vraie dévotion à la sainte Vierge, n°248

[3]Heb. X, 7

[4]Philipp. II, 5 et 8

[5]Le Secret admirable du Très Saint Rosaire, de saint Louis-Marie Grignion de Montfort (Seuil)

[6]Traité de la vraie dévotion à la sainte Vierge, n°248

[7]Heb. X, 7

[8]Philipp. II, 5 et 8